Les Danses guerrières

Si l'homme de la période néolithique a exécuté des danses de rituel de chasse afin de pouvoir tuer ou capturer l'animal qu'il convoitait, on peut facilement supposer qu'il a pu exécuter des danses de rituel de guerre pour souhaiter la mort de l'ennemi, dont il convoitait les terres et les richesses, ou bien pour se défendre contre l'ennemi qui désirait s'approprier des siennes. Sans posséder de preuves formelles de ce rituel chez l'homme de la préhistoire, nous pouvons en déduire l'existence en voyant les rituels de guerre des peu peuplades primitives amérindiennes et africaines. La vie du primitif était très rude et l'on peut supposer que les guerres étaient nombreuses dès cette époque. Connaissant la place qu'occupaient, chez lui, les croyances et les rituels, il est possible de se le représenter exécutant une danse concrète de guerre pour envoûter l'esprit de son ennemi afin de le tuer. On retrouve chez les tribus amérindiennes des danses de guerre qui sont accompagnées du battement effréné du tambour et des cris des participants. Ces danses servaient généralement de préparation en vue de l'attaque de l'ennemi. On y atteignait un certain point d'excitation qui favorisait le développement du courage et de la force du guerrier. Durant le temps d'absence des guerriers, les femmes, les enfants et les hommes âgés de la tribu, exécutaient d'autres formes de danse afin d'assurer le retour en vie des guerriers. Au retour, on y exécutait des danses funèbres, en l'honneur des guerriers morts à la bataille et d'autres danses afin de célébrer la victoire.

Toutefois c'est en Grèce antique que l'on retrouve officiellement les premières danses guerrières. Parmi celles-ci on retrouve la Gymnopédie, la Laconienne, la Hormos, la Mycène et la plus célèbre, la Pyrrhique. Ces danses guerrières avaient pour but d'exalter les vertus guerrières des soldats. La Gymnopédie était dansée par deux groupes d'adolescents et d'enfants, nus, qui chantaient en dansant. C'était une danse de procession. Les meneurs de la danse étaient appelés "Tyrrhéatics" en mémoire de la victoire de Tyrrhé et ils portaient une couronne de lauriers. La Laconienne était composée de trois chœurs, représentant le passé, le présent et le futur, et était exécutée pour donner aux soldats, la force et l'agilité nécessaires pour utiliser leurs armes: lance, bouclier. Elle était accompagnée de chants.

Les vieillards débutaient ainsi:

"Jadis nous étions jeunes et heureux comme vous vaillants, audacieux et actifs en plus"

Les jeunes hommes répondaient:

"C'est maintenant notre tour, vous verrez nous n'avons jamais été aussi méritants que vous."

Et les enfants enchaînaient:

"Le jour viendra où nous vous montrerons des faits qui surpasseront tout ce que vous avez fait."

La Hormos était une danse guerrière gracieuse et vivante.


La danse des sabres des Vikings autour des cornes sacrées (époque 900)

Elle était formée de garçons et de filles en alternance, décrivant un serpentin. Les garçons essayaient de se surpasser les uns les autres en exécutant une variété de mouvements et de positions guerrières. La partenaire suivait avec des pas gracieux. Un meneur dirigeait les mouvements au son de la lyre. Cette danse était caractérisée par le contraste entre le courage des soldats et la féminité des partenaires. La Mycène était une autre danse. Celle-ci était exécutée par les soldats qui effectuaient des mouvements avec leurs boucliers, le tout au son de la flûte. La plus célèbre des danses guerrières de la Grèce antique est la Pyrrhique. D'après les lois de Sparte, tous les garçons de plus de cinq ans devaient l'apprendre et participer aux exercices sur la place publique. Elle était exécutée au son de la flûte par des danseurs en armure de guerrier qui simulaient des actions de guerre, incluant les mouvements d'attaque et de défense. Cette danse était divisée en quatre parties: 1) le Podisme, constitué de mouvements rapides des pieds, qui étaient nécessaires pour avancer sur l'ennemi ou même parfois pour s'enfuir; 2) le Xiphisme ou la bataille simulée; 3) Le Kosmos, où l'on exécutait des sauts très élevés, afin de s'entraîner à franchir des obstacles ou des murs; et finalement 4) le Tetracomo, figure lente et majestueuse exécutée en carré. Dans les premiers temps cette danse était exécutée par les hommes seulement, plus tard une partenaire fut jointe à chaque soldat. Platon considérait cette danse comme étant une des deux plus belles danses de la Grèce.

Les danses de guerre ne semblent pas avoir été utilisées par les Romains. Toutefois, au Moyen Age, on retrouve en Europe une danse des épées que certains historiens associent à une danse de guerre. Cette théorie est toutefois niée par certains autres historiens qui prétendent au contraire qu'il s'agit d'une danse de rituel d'initiation. Sans prétendre vouloir trancher le litige, nous traiterons de cette danse à l'intérieur du présent thème.

On retrouve une danse des épées dans les danses traditionnelles de presque tous les pays d'Europe et de plusieurs pays d'Amérique. Ainsi, on retrouve cette danse en Belgique, en Autriche, en Tchécoslovaquie, en Russie, en Allemagne, en Suède, en Écosse, en Bretagne, en Espagne, en France, dans les Pays Basques, en Grande-Bretagne et au Mexique. Dans le cas du Mexique la chose est facilement compréhensible, car on sait qu'il fut colonisé par les Espagnols. On la retrouve en plus en Macédoine, en Italie, aussi bien en Sicile qu'au Piémont, et en Hongrie.


La danse des sabres

On retrouve dans ces différents pays des caractéristiques identiques pour l'exécution de cette danse. Ainsi la danse est presque toujours exécutée par des hommes, qui sont vêtus de blanc et qui jonglent avec une ou des épées. Parfois l'épée est remplacée par un bâton. Les danseurs portent habituellement un chapeau fleuri, des rubans et des clochettes attachées aux jambes. Sur le plan du déroulement, on retrouve aussi des traits communs à chaque pays. La danse s'exécute en forme de chaîne, c'est-à-dire de ronde. Chaque danseur est relié à celui qui le précède et à celui qui le suit par l'épée. Dans certaines parties de la danse, cette ronde ne devait pas se rompre. Cette formation de ronde ne constituait qu'une partie de la danse. Dans d'autres parties de la danse, on faisait une sorte de pont avec les épées, on passait sous le pont, on sautait par dessus les épées, on formait une "rose" en croisant les épées, on passait sous la rose, on sautait sur la rose, on plaçait les épées autour du cou d'un danseur qui était appelé "le capitaine", on simulait un combat, on tuait le capitaine, on élevait le capitaine debout sur la rose. Parfois encore les danseurs exécutaient des moulinets au dessus de leurs têtes avec les épées.

Cette danse était exécutée dans les rues ou sur les places publiques, devant les monuments municipaux ou les habitations de personnes importantes, religieuses ou civiles. Mais il y en eut aussi à l'intérieur des bâtiments municipaux, des salles de fêtes et de bals, des marchés et dans les salles d'armes. Toutefois la documentation consultée ne précisait pas Si la danse des épées était un rituel spécifiquement militaire exécuté par des soldats ou une danse de guerre exécutée par le peuple.


Soldats valaques dansant au son d'une musique tzigane

Néanmoins nous retrouvons au XVIIIe et au XIXe siècle la danse comme partie intégrante de la formation des officiers de la marine de guerre et de l'armée de terre en Europe et aux Etats-Unis. Ainsi à l'époque de Louis-Philippe (1830-1848) en France, des exercices chorégraphiques régimentaires donnaient lieu même à des examens et à la délivrance de brevets de danse. A West-Point, les futurs officiers de l'armée américaine participaient à la fin du XVIIIe siècle à des activités de danse. Les historiens ne s'entendent pas non plus ici sur l'objectif de ces exercices. Certains prétendent qu'ils visaient à assurer au futur soldat un certain statut social, lors des réceptions régimentaires, alors que certains autres pensent qu'ils étaient destinés à donner aux recrues et aux sous-officiers la souplesse indispensable au corps-à-corps. Disons que la danse permettait d'atteindre les deux objectifs.

**** par France Bourque et Michel Landry

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