Les traditions de Pâques en Roumanie.

Autrefois, la Pâque était le temps sacré du pardon et de la purification. Après 40 jours de jeûne, toute la nature participait au miracle de la résurrection du Christ. De nos jours, les églises résonnent encore de chants annonçant le même miracle. Les gens se préparent minutieusement pour cette sainte célébration : ils s’occupent des champs, nettoient leur maison, lavent leur linge… Tout cela parce que l’on dit que les jours de Pâques, le ciel s’ouvre et les esprits des morts reviennent sur terre. Les vivants allument des feux dans la cour pour les réchauffer et gardent le silence. Jadis, les bergers se réunissaient sur les collines, autour de feux immenses – appelés « feux de veille » – et racontaient des histoires liées la résurrection.

   

De nos jours, dans les villages de Maramures, dans le nord de la Roumanie, on retrouve la même atmosphère d’autrefois. Les coutumes de Pâques sont respectées dans les moindres détails, précise Grigore Lutai, prêtre du village de Sapânta : «La nuit de Pâques, à minuit plus précisément, les gens font 3 fois le tour le l’église, des cierges allumés à la main, puis ils entrent 3 fois dans l’église en chantant le Canon de la Résurrection, avant de rentrer chez eux. Le lendemain, à 7 heures du matin, ils reviennent pour assister à la Sainte Messe dans le jardin de l’église, juste devant le célèbre Cimetière Joyeux. Selon une coutume d’ici, de Sapânta, les gens apportent à l’église des sacs remplis de plats traditionnels : des brioches au fromage, de l’agneau farci, des saucisses fumées, du lard fumé, de l’ail, des oignons, du vin, des brioches – cozonac – pour que les mets soient bénis. Précisons aussi qu’avant Pâques, pendant le jeûne, tout le monde est habillé de noir, même les enfants de 4 ou 5 ans. Plus encore, pendant la Semaine Sainte, on observe le jeûne noir à compter du Jeudi Saint jusqu’au Dimanche de Pâques ».


Pendant la Semaine Sainte, de nombreux croyants se rendent à l’église pour assister aux messes. Le Jeudi Saint on lit les 12 Evangiles de la Passion du Christ et on met la Sainte Croix au milieu de l’église. Le Vendredi Saint il n’y a pas de Liturgie, c’est une journée de deuil lorsque l’on chante la messe funèbre, une des plus belles messes consacrées à la mort du Christ. Les cloches ne sonnent plus jusqu’à la nuit de la Résurrection. Le samedi, on n’entend que la simandre et il n’y a pas de messes non plus.


Voyons maintenant comment se préparent les habitants de la Bucovine pour la fête des Pâques. Ecoutons l’ethnologue Emil Camilar : «Le Samedi Saint on prépare les plats traditionnels, notamment les desserts cuits au four et les plats à base d’agneau. Les œufs rouges sont préparés d’avance, parce qu’ils prennent plus de temps. Le soir venu, les gens vont se coucher. Ils se reposent quelques heures pour aller ensuite à la messe de minuit. Avant de partir à l’église, chaque membre de la famille se lave, mettant dans l’eau un œuf rouge et une pièce d’argent. C’est un rituel pour rester en bonne santé – comme l’œuf – et pour être recherchés – comme l’argent. Autrefois, le début de la messe était marqué par des coups de «sàcàrus» – un outil faisant beaucoup de bruit. De nos jours on annonce la messe à l’aide des pétardes. Après la messe de Pâques, les gens rentrent à la maison, des cierges allumés à la main. Ils se signent, puis c’est l’heure du festin. Avant toute chose, doit cogner son oeuf contre celui du voisin».


Peindre les oeufs est une tradition pascale très ancienne en Roumanie, devenue un véritable art. On commence à peindre les œufs le Mardi Saint et on finit le Vendredi Saint au plus tard. Les œufs sont décorés de motifs folkloriques et de symboles chrétiens.

Une pratique intéressante et compliquée à la fois, comme nous l’explique Marilena Niculità, qui participe chaque année au festival des œufs peints de Ciocanesti (dans le nord de la Roumanie) : «Avant de commencer, il faut vider l’œuf, et le laver très bien à l’intérieur et à l’extérieur. Puis, on réchauffe de la cire et on l’applique sur l’œuf à l’aide d’un instrument à peindre appelé «chişiţă». Puis on passe aux couleurs. On met l’œuf dans de la couleur jaune, on fait le modèle. Quand le jaune a séché, on fait le modèle rouge et ainsi de suite. Le noir est la dernière couleur utilisée. Après avoir fait le dessin, on met l’œuf au – dessus d’une source de chaleur pour faire fondre la cire. Autrefois, on ne vidait pas les œufs, on les faisait bouillir tout simplement. Mais l’on a constaté que de cette manière on ne pouvait les garder qu’une dizaine ou une vingtaine d’années. Maintenant, les œufs vidés avant d’être peints peuvent résister même 200 ans».

De nos jours donc, on ne mange pas les œufs peints, ce sont des objets décoratifs. Il faut 3 ou 4 heures pour peindre un seul œuf et ce serait vraiment dommage de détruire ses beaux «vêtements».

Pourtant, dans chaque foyer on prépare des œufs colorés pour Pâques : rouges, jaunes, verts, bleus. Selon la coutume généralement répandue, il faut cogner son oeuf contre celui du voisin pour le rencontrer dans le monde de l’au-delà. Dans certaines régions, celui qui réussissait à casser l’œuf de son voisin sans casser le sien avait le droit de le prendre. Les gens réunis à table entraient dans une véritable compétition, essayant de choisir l’œuf le plus dur et de collecter une grande quantité d’œufs.

De même, on dit que c’est bien d’offrir un tiers des œufs rouges pour commémorer les personnes décédées. En Munténie, dans le sud de la Roumanie, les gens font circuler les œufs rouges au-dessus des tombes en prononçant le nom de la personne qui y est enterrée.

En Transylvanie, le lundi de Pâques, les jeunes hommes habillés en costumes traditionnels arrosent avec du parfum les jeunes filles. Celles – ci, à leur tour, leur offrent quelque chose à boire et de petits cadeaux. Selon la coutume, ces filles auront de la chance toute l’année, alors que les garçons qui oublient cette pratique auront de la malchance. Aujourd’hui c’est du parfum, mais autrefois les filles étaient arrosées avec de l’eau des fontaines.

Enfin, avant Pâques, les enfants cueillent de petites fleurs blanches qui poussent dans les champs et les emmènent à l’église le Vendredi Saint. On dit que ces fleurs blanches sont nées des larmes de Jésus.

Entre Pâques et l’Ascension, 40 jours durant, les Roumains se saluent en disant «Hristos a înviat !» «Le Christ est ressuscité !» et répondent «Adevarat a înviat !» (Il est vraiment ressuscité !).

Dossier écrit par Teofilia Nistor, Valentina Beleavski

Source : Voyages Ideoz


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