Evolution de la Musique traditionnelle
en Macédoine grecque

La musique traditionnelle de Macédoine centrale (province Almopia) s'est formée et développée sous l'influence des régions voisines des Balkans. Cette musique est intimement liée au chant, donc à la langue et à la danse.
La musique populaire est l'élément de base de la création.
Le texte des chansons est adapté à chaque circonstance : mariage, baptême, fêtes religieuses, aubade amoureuse, etc...
La langue utilisée est le dialecte local macédonien. Les instruments qui accompagnent le chant sont le tamboura (sorte de mandoline), la flûte, le caval, la gaïda (cornemuse) et le daouli (gros tambour).
Après la libération de 1912 (fin de la turcocracie en Grèce) et surtout pendant l'entre deux guerres, les instruments changent progressivement. De nouveaux instruments sont introduits par les forces turques et européennes qui assurent une surveillance dans la région en vue de maintenir la cohabitation pacifique des différentes ethnies. Les fanfares créées par ces forces spéciales introduisent la clarinette puis les cuivres (trompettes, trombone, etc...) et plus tard l'accordéon.
Parallèlement à l'introduction de ces nouveaux instruments, l'interdiction de la langue, principalement entre 1930 et 1940, a un effet décisif sur l'orientation de la musique populaire.
Depuis la dictature de Métaxa, on ne chante plus en Macédoine sous peine de répression très sévère. Depuis peu, on entend à nouveau des chants macédoniens dans certaines fêtes.
L'absence de la parole a créé de nouveaux besoins, les musiciens traditionnels se sont retirés progressivement des manifestations publiques pour se limiter à des fêtes de familles où ils jouaient en petits groupes.
Les nouveaux instruments, plus sonores, se sont imposés assez vite dans les grandes fêtes de village (Panigyria) et les musiciens populaires se sont adaptés.
Actuellement les orchestres de cuivre sont en général identifiés à la musique populaire de Macédoine.
Malheureusement on remarque que les musiciens, ne connaissant plus les chansons traditionnelles, ont tendance à s'éloigner de façon importante des mélodies initiales et de leur structure. Les musiques ne sont plus inspirées par les textes et l'âme de la tradition locale se perd. Le sentiment fait défaut et les plus âgés des danseurs sont désorientés et déçus.
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Les diverses mélodies :
1. Gaïde : Il s'agit d'une improvisation du joueur de gaïda. Il accorde son instrument et se met en "forme" lui-même pour jouer la suite. Ce n'est pas une danse.
2. Sarakina : Variante de la danse baïdouskino. Se rencontre dans le village de Orma (Rythme 7/8). Dansée surtout par les femmes. Le nom de la danse provient de celui de la femme à qui s'adresse la chanson qui accompagne la danse.
3. Trite-Pati : 7/8. Connue aussi sous le nom de Masko(to), c'est-à-dire "homme" car surtout dansée par les hommes, ou Zavlistséna, c'est-à-dire "glissée" à cause du 2ème pas glissé. Dansée dans tous les villages d'Almopia. Tient son nom des trois sursauts dans la danse.
4. Popova Kerka (ou Ramna) : 2/4. Ramna est une des principales danses du groupe des "Sta tria" dans la région, avec de nombreuses mélodies. Ramna veut dire "par les épaules" (position des bras). La partie rapide de la danse permet au premier danseur de la chaîne de se distinguer en exécutant des figures. Le premier danseur est toujours un très bon danseur, un personnage respecté et jouissant d'une influence. Les autres danseurs l'accompagnent simplement. D'après les plus anciens, la danse avait un effet magique; elle avait un rôle expiatoire et elle sanctifiait les événements au cours desquels elle était dansée (mariage par exemple).
5. Stogianitse (de la fille de Stogian) : 7/8. Il s'agit d'un syrto macédonien.
6. Patrounino : 11/16. La terminaison "ino" infique l'origine et dans ce cas particulier, la possession : c'est la danse de Patrouna. Se danse sur deux mélodies, le Patrouno et le Stoïna, de la même façon dans tous les villages d'Almopia avec deux variantes dans les pas et un style différent pour les hommes et pour les femmes.
7. Tikfeskino : 4/4. La traduction libre est "danse du potiron" sans pourtant qu'il n'y ait de rapport avec les potirons! La terminaison "ino" indique, ici, la provenance de Tikfes, dans la région occidentale du mont Kaïmaktsalan, actuellement au Fyrom. Les habitants de cette région avaient des relations commerciales avec les habitants d'Almopia. Le résultat de ces contacts fut l'emprunt réciproque d'éléments de musique et de danse. La danse se rencontre également sous le nom de Kribo(to), c'est-à-dire "boîteux". Il existe deux mélodies sans paroles. Le pas des hommes est différent de celui des dames.
8. Baïdouskino : 7/8. Danse largement répandue dans les villages de Macédoine avec de nombreuses variantes. Le pas de boîteux sec et les arrêts sont les caractéristiques de la danse. Malgré la ressemblance du nom, il n'y a pas de rapport avec le Baïdouska balkanique.
9. Bouftsansko : 2/4. Banse de Boufi actuellement Akritas, près de Florina.
10. Poustieno : 16/16. De Poustam" (exécution laissée libre). Danse de la région de Florina, danse fière et difficile.
11. Souleïmanovo (danse Molaévo) : 11/8. C'est la danse de Molah (chef religieux musulman). Danse la plus représentatrice de la région d'Almopia. Il existe de nombreuses mélodies qui présentent toujours une partie lente et une partie rapide. Dans la partie rapide, l'absence de parole libère la virtuosité des musiciens qui entraînent les danseurs dans de nombreux "méandres" : la danse est souvent appelée par le nom de ses mélodies : Stankina, Boukite, Souleïmanovo, Sbortsko et autres.
12. Pousitnitsa : 15/16 : Signifie "en position assise". Dansée par les hommes, librement, dans des circonstances de grande joie ou de grande tristesse. Autrefois, cette danse constituait une partie de la cérémonie du mariage quand avait lieu la démonstration publique de la virginité de la jeune mariée. Les amis du marié (Bratimia) dansaient jusqu'à l'épuisement avec beaucoup d'entrain et d'enthousiasme. Ils dansaient 2 à 2, l'un en face de l'autre, répétant quelques mouvements particuliers. Quelquefois, ils se tenaient 2 à 2 par la main ou par les épaules pour s'aider l'un l'autre dans l'exécution des accroupissements répétés. Souvent les amis du marié n'hésitaient pas à monter sur le toit de la maison du marié, pour y danser. Parfois, les danseurs s'efforçaient de danser sur un tout petit espace comme un plateau ou un tapsé. La danse ne fut plus exécutée quand la coutume en relation avec la virginité de la mariée disparût. C'était une danse réservée à quelques-uns et comme elle se danse seul, elle provoquait des réactions et des commentaires négatifs dans les panigirno (fêtes de village). On la voit encore souvent en spectacle.
13. Zaïko ou Komitinto (des Komitadzis) : 2/4. Danse d'hommes qui se répandit pendant la période du combat macédonien. Komitadzis ne signifie pas nécessairement bulgare.

Françoise DHOOSSCHE

Texte d'après Dimitri IOANNOU, chorégraphe, chercheur, directeur et animateur de l'association culturelle et laographique de Aridéa (nome de Pella) "Akpites Amopias".

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